La justice a rendu son verdict ce 26 novembre à l'encontre du capitaine du paquebot de croisière Azura, le condamnant pour avoir utilisé un carburant non conforme aux normes antipollution. L'Assocation française des capitaines de navires estime que la condamnation « crée une jurisprudence défavorable aux capitaines de navires dans l’utilisation de carburants dont ils n’ont pas le choix ».

 

L’affaire avait déjà fait grand bruit lors du procès le 8 octobre dernier. La sixième chambre du tribunal correctionnel de Marseille devait juger pour la première fois un capitaine de navire et un armateur poursuivis pour avoir enfreint les normes antipollution. Evans Hoyt, le capitaine américain de l’Azura, et le groupe Carnival (Carnival Cruise Lines, Princess Cruises, Cunard, Aida, Costa, P&O...), le plus grand opérateur mondial dans le secteur de la croisière, comparaissaient pour avoir utilisé un carburant (chargé à Barcelone lors d’une escale) avec une teneur en soufre de 1,68 %, supérieure à la limite autorisée par la réglementation sur la pollution de l’air (1,5 %). Le paquebot avait été contrôlé fin mars par le Centre de sécurité des navires (CSN) lors d’une escale à Marseille. Le capitaine américain avait quelques jours plus tard, lors d'une escale à Marseille, reconnu les faits.

Lors du procès, le procureur de la République avait été extrêmement sévère dans ses réquisitions, accusant l’armateur d’avoir voulu « économiser de l’argent au mépris des poumons de tout un chacun dans un contexte de pollution majeur de l’air causée pour partie par les croisières ». Les deux avocats invoquaient pour leur part des défauts dans la législation française quant à l'application des normes antipollution décidées au niveau européen, et considérées comme floues.

Le tribunal a décidé ce 26 novembre que le capitaine Evans Hoyt « connaissait pertinemment le caractère irrégulier du fioul », et que Carnival « n’a pas souhaité faire application de la norme légale », condamnant le capitaine à 100 000 € d’amende, dont 80 000 € à la charge du groupe américain. Parties civiles, France Nature Environnement, Surfrider Foundation et la Ligue de protection des oiseaux ont obtenu chacune 5 000 euros de dommages et intérêts.

Jurisprudence défavorable aux capitaines de navires 

L’AFCAN, l'association française des capitaines de navires, n’a pas tardé à réagir via un communiqué, « estimant que la condamnation du capitaine ne correspond pas à la réalité des faits, et crée une jurisprudence défavorable aux capitaines de navires dans l’utilisation de carburants dont ils n’ont pas le choix. » 

Pour le syndicat, « le Code de l’environnement français prévoit que seuls les navires à passagers effectuant une ligne régulière sont tenus à une teneur en soufre inférieure à 1,5 %, les autres étant limités à 3 %. » Or, selon l'AFCAN, l’Azura opère alternativement en Europe et en mer Caraïbe, et n’a effectué que deux escales à Marseille depuis sa mise en service en 2010, indique-t-il. 

Il rappelle que la condamnation est basée sur l’application d'un article (L218-2), modifié par ordonnances à plusieurs reprises, « la dernière non ratifiée depuis le dépôt du projet de loi du 11 mai 2016, et dépassant de ce fait très largement la date limite de ratification légale. » 

--- A.D.---

 

 

 

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