D’après les premières conclusions de l’enquête réalisée par l'Autorité maritime et portuaire de Singapour, le combustible de soute contaminé a été livré à quelques 200 navires. Quatre-vingt d'entre eux ont déjà signalé divers problèmes avec les pompes à carburant et les moteurs.

Nouvel épisode dans ce qui s’annonce de plus en plus comme une « affaire ». L'Autorité maritime et portuaire de Singapour (Maritime & Port Authority, MPA) a fait part des premières conclusions tirées de son enquête préliminaire sur le fuel à haute teneur en soufre (HFO) contaminé par de fortes concentrations de composés organiques chlorés (COC), qui a été délivré par le port à la mi-février. 

L’affaire avait été signalée aux autorités compétentes à la mi-mars suite à des problèmes rencontrés par des navires sur les moteurs notamment. La MPA assure avoir immédiatement contacté les fournisseurs de combustibles de soute concernés afin qu'ils suspendent les opérations et qu’ils informent les propriétaires de navires potentiellement concernés.

Les autorités de la Cité-État confirment que Glencore et PetroChina sont bel et bien à l'origine de la fourniture du combustible dégradé. Le premier, négociant en matières premières, a fourni directement des navires mais aussi livré PetroChina, qui se retrouve ainsi indirectement impliqué.

200 navires

Après avoir reçu des rapports sur la contamination de son carburant, Glencore indique avoir procédé à des tests sur les carburants utilisés dans son blend et a découvert que l'un d'entre eux, « provenant de l'étranger », contenait environ 15 000 ppm (« partie par million », unité de mesure communément utilisée par les scientifiques, pour calculer le taux de pollution dans l’air, une ppm = 1 mg/kg) de COC. Au moment des tests, Glencore avait déjà vendu une partie du carburant concerné à PetroChina. 

À ce jour, les deux fournisseurs auraient distribué le carburant concerné à environ 200 navires dans le port de Singapour selon l’administration portuaire. Quatre-vingt d’entre eux ont signalé divers problèmes avec leurs pompes à carburant et leurs moteurs.

En tant que produits pétroliers, les combustible de soute sont soumis à des normes internationales. Leur nomenclature relève de l’Organisation internationale de normalisation OIN 8217 (ISO 8217). Or, les COC échappent à la détection par les procédures ISO 8217 et ASTM D7845 car ces normes ne prévoient pas de tests pour ces contaminants.

Le carburant acheté par Glencore était conforme à l’ISO 8217. Glencore avait également effectué des tests supplémentaires en se basant sur la norme D7845 de l'American Society for Testing and Materials (ASTM).

Premier cas au cours des deux dernières décennies

« Il s'agit du premier cas de contamination de carburant due à des niveaux de concentration élevés de COC signalé à Singapour au cours des deux dernières décennies », déplore l’autorité portuaire, qui en tant que premier centre mondial de soutage, prend l’affaire très au sérieux. « Nous échangeons actuellement avec l'industrie pour mettre en place des contrôles supplémentaires sur la qualité du carburant qui permettraient de détecter les produits chimiques inacceptables ». La MPA a également l'intention de soumettre un document sur la problématique COC à l'Organisation maritime internationale (OMI) à des fins de « sensibilisation de ses membres. » 

La société d'analyse de carburant, Veritas Petroleum Services (VPS), qui avait recensé initialement une soixantaine de navires potentiellement avitaillés par le combustible incriminé, indique qu’il n’y a pas eu de nouveaux rapports d’incidents à bord des navires depuis mars. Mais VPS s’attend à ce que le problème se soit exporté.

A.D.